Aux confins septentrionaux du Béarn, dans un paysage de piémont pyrénéen s'élabore un des plus fameux vins moelleux du Sud-Ouest : le pacherenc du Vic-Bilh, un voisin peu connu du jurançon, mais tout aussi méritant.
© J Frizot. |
Ces vendanges, c'est aux confins de la Bigorre, de l'Armagnac et du Béarn qu'elles ont lieu, dans un agréable paysage de vallons que les spécialistes géologues appellent « un pays de piémont ». Ici, à l'instar des alignements de sarments du vignoble, le pays est constitué de lignes de coteaux parallèles, à peu de chose près alignés sur un axe nord-sud, des coteaux qui exposent idéalement sur leurs pentes des vignes réputées. Madiran, pacherenc, cela ne vous dit peut-être rien, mais ici, c'est une des grandes passions de dizaines de producteurs, qui, entre Aquitaine et Midi-Pyrénées, entre champs de céréales et fermes en briques ou en torchis, ont uni leurs efforts autour de ces deux produits. Le premier est un vin rouge à base de cépage annat, tempéré par la présence du cabernet, mais ce vin, sur lequel nous reviendrons dans cette rubrique, possède une particularité : aussi généreux qu'incontournable localement, il partage son terroir avec le second, nommé pacherenc (*) du Vic-Bilh (« vieux village » en langue d'oc), breuvage issu de cépages blancs, dont l'arrufiac (30 %), le petit courbu, et les deux variétés de maseng, le gros et le petit. Mieux, l'annat, pourtant largement majoritaire – 1.150 hectares sur les 1.400 que compte le vignoble - laisse même les meilleurs terres à son confrère, celles des versants ouest, composées d'argile, ne gardant pour lui que les sols le plus souvent situées sur les versants est, plus secs et érodés, aux sols dits à « grepp »qui confèrent au madiran toute sa spécificité.
Le royaume des vins moelleux
Voilà pour les différences de terrains. Pour le reste, les deux productions sont soumises aux mêmes nécessités : une culture dite en demi-hautain (c'est-à-dire des vignes de 1,10 m de hauteur) dont certains spécimen de pieds peuvent être parfois plus que centenaires (certaines vignes de ce vignoble auraient, en effet échappé au phylloxéra) et une A.O.C obtenue en 1948 pour les deux vins, de madiran et de pacherenc.
Enfin, si le premier se conjugue au singulier, le pacherenc de Vic-Bilh est double, tant sec, tantôt doux. Le sec est produit sur des terres soumises à un ensoleillement relativement faible, et au bout de trois mois d'élevage, développe des arômes floral accentués par la présence du cépage arrufiac qui lui donne cet arrière-goût de « pierre à fusil » comme les pouillys bourguignons. Quant au doux, vendangé chaque année entre le début octobre et la mi-novembre, il nécessite un élevage, de l'ordre de quatre à six mois, pour atteindre une franche perfection au bout de cinq longues années. Vous l'aurez sans doute compris, on est ici dans le royaume des vin moelleux, plutôt puissants et amples, le royaume de ce vins qui dégagent des parfums de fruits exotiques. Ici, en terre béarnaise, comptez sur des arômes de goyave, ananas, mais aussi de mangue, auxquels s'ajoutent des parfums d'écorce d'orange, de miel, de pamplemousse, de noisette, voire de noix de muscade…
(*) Nom tiré du gascon « pacherads », c'est-à-dire échalas, ce pieu en bois qui soutient la vigne.
Article paru dans le supplément culturel hebdomadaire du journal quotidien Le Bien public intitulé
Quartier libre n°236 (du 06 au 12 mai 2005), J Frizot.
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