jeudi 26 avril 2012

Retour à la tradition avec la moutarde de Charroux


AUVERGNE : LIMAGNE BOURBONNAISE

Certains pensaient la pratique perdue, d'autres n'ont pas hésité à retrousser leurs manches pour redonner vie à cette tradition locale, celle de la moutarde de Charroux, dont la finesse n'a d'égale que la beauté du village éponyme classé parmi les plus beaux de France !

Charroux en Limagne bourbonnaise, et non pas Charroux, chef-lieu de canton en Vienne, côté Atlantique. Charroux, bourg de caractère classé parmi les plus beaux villages de France, perché sur son plateau, aux rues et ruelles pavées à l'ancienne, avec ses belles maisons à colombages et son enceinte… Nous sommes ici à la limite du bocage bourbonnais, avec son parcellaire orné de haies vives, ses prés où paissent vaches et veaux, et la Limagne bourbonnaise, paysage de plateaux tant sur sa façade orientale qu'occidentale, délimitant la partie la plus septentrionale de l'opulente et fertile plaine de Limagne. Ici, vous pénétrez dans le royaume des plaines cultivées, où les cultures délimitent un camaïeu de vert, brun, jaune, sur des sols noirs, colorés par l'humus végétal, riches de promesses pour les cultivateurs locaux.
Ici aussi, comme en Bourgogne, une tradition de moutarde était née jadis, aidée par les nombreux échanges de cette terre de passage, drainée par l'Allier et son affluent la Sioule. Une moutarde qui disparut momentanément au milieu du siècle dernier, pour être remise au goût du jour par un couple de producteurs qui relança sa fabrication au tournant des années 1990. En s'inspirant de documents anciens, important leur graine de sénevé du Canada, ces fabricants artisanaux ajoutent à la graine broyée du vin blanc de Saint-Pourçain, issu du cépage local dit tressalier qui donne à la mixture un goût particulier. Après quelques semaines de maturation, la pâte est prête à être conditionnée. Avec l'aide de grands chefs locaux, (citons Troisgros, Ritz, Passard…), de nouvelles saveurs ont été créées, comme « Pourpre de Saint-Pourçain » : rien à voir avec les vins de la ville homonyme, si ce n'est l'utilisation, dans sa réalisation, non pas de vin, mais de vinaigre rouge ainsi que du jus de raisin rouge au lieu du classique vinaigre blanc. Cette moutarde semble être particulièrement appréciée sur du gibier.
Au total, la petite entreprise familiale produit pas moins de 40 tonnes de moutarde par an, dont - fierté locale - quelques palettes partent vers le Japon ou encore l'Uruguay.

Julien Frizot – Le Bien Public – Quartier libre n°184 (du 07 au 13 mai 2004).

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