mercredi 12 décembre 2012

La résurrection de la « coucou »


BRETAGNE : LE PAYS RENNAIS

A l’approche des fêtes de fin d’année, petite visite en pays rennais à la coucou, tendre volaille méconnue qui a toute sa place dans ni assiette.

Rennes, douzième ville de France, métropole de la Bretagne, irrigue de ses activités un large bassin, en fait une vaste dépression, qui offre aux visiteurs toute la variété du patrimoine breton des marches…
Loin des enclos paroissiaux de l’extrémité finistérienne, le pays rennais constitue un ensemble de jolis villages, lotis au milieu d’une campagne parsemée de belles demeures seigneuriales, de beaux manoirs, mais aussi d’églises originales et autres croix de cimetière. Au cœur de cette belle province, sa capitale, la ville de Rennes, hélas malmenée par l’Histoire. En 1720, l’incendie qui se déclenche dans une boulangerie embrase tout le centre de la cité pendant pas moins de… six jours ! Les habitations étant alors pour leur plus grande partie en bois, la ville est au trois quarts détruite.
Il n’en reste aujourd’hui qu’un bien modeste pâté de maisons de style médiéval… La reconstruction s’effectue promptement. Les édiles locaux interdisant toute construction en bois, la ville se pare de belles et larges rues à angles droits dans un style résolument moderne, où le granit domine. Mais telle une malédiction, c’est encore le feu qui vient nuire à la belle bretonne : dans la nuit du 4 au 5 février 1994, un incendie ravage le bâtiment du Parlement, miraculeusement épargné par les flammes de 1720.
Rennes et son pays, endurci aux épreuves et résolument prompt au renouveau ? Peut-être. C’est en tous les cas ce genre de démarche de résurrection dont bénéficie la coucou de Rennes, un gallinacé menacé que des producteur remettent au goût du jour depuis plus d’une dizaine d’années.
Des animaux bagués pour le marché
Au XIXe siècle, cette volaille semble omniprésente dans la campagne rennaise, cuisinée par toutes les familles qui possède une basse-cour mais aussi celles qui l’achète sur les étals des marchés locaux. Comme bien des espèces animales ou des variétés de fruits et légumes, la bête n’échappe pas à la course technologique et à la productivité de l’Après Guerre. La plupart des exploitants s’imagine chefs d’entreprises poussées dans leurs ultimes rendements. La coucou de Rennes s’efface alors face à des espèces de volatiles de croissance plus rapide !
C’est par la culture que vient le salut du gallinacé : l’Ecomusée de Bretagne semble porter un intérêt croissant à l’animal au fur et à mesure que ses recherches demeurent infructueuses. La coucou aurait-elle disparue sans crier gare ?
Non… Une poignée de spécimens est découverte dans la banlieue rennaise et l’Ecomusée lance l’initiative de relancer sa production moribonde avec quelques agriculteurs. Pour cela, rien de telle qu’une image de qualité, celle par exemple de l’élevage traditionnel. Celui-ci exclut les farines de viande et de poissons, les OGM, les antibiotiques et les hormones de croissance. Les animaux sortis sur le marché seront aussi bagués, pour les dissocier de leurs concurrents. Et les efforts finissent par payer : la chair au léger fumet de noisette de l’animal séduit les restaurateurs qui trouvent dans cette viande blanche nombre d’atouts pour leur grande cuisine.

Julien Frizot - journal Le Bien Public - Quartier Libre n° 269 (du 23 au 29 décembre 2005).

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