CORSE : LE NEBBIO
La seule terre corse à disposer d'un socle
argilo-calcaire en terre granitique le Nebbio, n'est pas restée avare
puisqu'elle dispense à d'ardents travailleurs ses bienfaits aux cépages
autochtones des vins patrimonio.
Quand on évoque la Corse, on pense surtout à l'été,
aux larges baies aux eaux turquoises, aux jolis villages perchés écrasés par le
soleil, mais rarement à l'hiver.
Et pourtant, c'est à cette saison que fait référence
l'origine du nom de pays : nebia (la brume), qui a en effet laissé son
souvenir à ce bout de l'Île de Beauté, une brume qui remplit le golfe de
Saint-Florent, du nom de la capitale locale.
Le Nebbio se résumerait presque au bassin
hydrographique de l'Aliso.
Au couchant, c'est l'Ostriconi qui fait figure de
frontière avec le pays voisin de Balagne.
Au levant, le pays s'appuie sur le cap corse, à
hauteur de Bastia. Pour le reste, le coin ressemble à bien des paysages de
l'île, avec ses routes en lacets à faire pâlir d'angoisse tous les conducteurs
de camping-cars, des pentes parfois abruptes sur lesquelles se développent
oliviers centenaires, vergers multicolores, pâtures à moutons, mais aussi
maquis, grâce, notamment, aux incendies. Au milieu de ce décor parfois
dantesque qui ferait perdre pied au plus aguerri des bouquetins, le vignoble ne
fait guère figure de favori. Minoritaire, il ne couvre que quelques centaines
d'hectares seulement, qui produisent le vin patrimonio, une appellation
d'origine corse contrôlée obtenue dès 1968, et dont les vignes se concentrent
surtout sur les communes d'Oletta, Saint-Florent, Barbbagio, Poggio d'Oletta et
Patrimonio. D'ailleurs, il n'y a pas une, mais des appellations patrimonio,
puisque ce vignoble donne tout à la fois des vins rouges, issus du fameux
cépage autochtone nielluciu, des vins blancs issus du vermentino (aussi appelé
malvoisie), et des rosés. Le premier promet une certaine rigueur, une finesse
et une densité qui font toute la réputation de ces vins encore trop méconnus.
Des vins de qualité
À tort, bien sûr, puisque les vins rouges sont en
plus d'excellents vins de garde au saveurs de fruits rouges ronds et gras en
bouche.
Les blancs issus de la malvoisie sont des vins secs
aux arômes de rose, acacia et autre fleurs blanches envoûtantes Quant aux
rosés, ils son issus, aussi, de cépages nielluccio mais ont plutôt tendance à
développer des arômes portant sur des gammes de framboise et de groseille. Seul
point commun à ces vins aux robes variant du jaune doré au blanc pâle en
passant par le rouge foncé ?
Celui de la terre qui reste en grande majorité
granitique sur l'île de Beauté, sauf là où le sol devient comme par
enchantement plutôt argilo-calcaire.
Autant être clair : l'extension agricole n'est
pas à l'ordre du jour sur ces terres bénies des dieux, la place au soleil est
chère en Corse, amenant les producteurs à privilégier lé qualité à la quantité
de leur vin.
D'ailleurs, ici, on a de cesse de le dire, avec cette
fierté très insulaire : « c’est l'homme qui fait la vigne et le
vin ».
Julien Frizot – Le Bien Public – Quartier libre n°248
(du 29 juillet au 04 août 2005).