Quand toute une région vit à l'unisson du plus noble des. produits, celui que les hommes cherchèrent de tout temps, le paysage ne peut que vibrer pour lui. Guérandais, pays de la plus fameuse des fleurs de sel est de celles-là…
© J Frizot. |
L'eau, le soleil et le vent : ce tiercé gagnant,
avec la complicité de la main de l'homme, n'en finit pas de donner le « la »
à cette région littorale, d'influer sur son bien-être, son moral, sa bonhomie.
Que la saison des paludiers soit mauvaise, tout le pays s'en ressent, que les
marais prennent froid, le Guérandais est en deuil. Voilà tout de même un bon
millénaire que cela dure, que ce qu'il est ici convenu d'appeler le « caviar
de la mer » fait la pluie et le beau temps.
Au coeur du pays, la "Carcassonne bretonne"
Au coeur du pays, la "Carcassonne bretonne"
Pour poursuivre la métaphore, certains diront que ce
sel se paye ici un emballage somptuaire, qui inspira des générations de
peintres aquarellistes et autres photographes en mal d'images doucereuses.
Mieux, la capitale de ce petit pays possède elle aussi un somptueux écrin, légué
par des générations de Guérandais : une ceinture de remparts qui autorise
les gens d'ici à appeler respectueusement leur ville, la « Carcassonne
bretonne ».
En fait, ce n'est pas un, mais deux caviars, un peu
comme les Russes ont le « sévrouga » et le « bélouga ».
Ici, on a le gros sel et la fleur de sel : le premier possède une couleur
grise, due à la base argileuse des œillets, ces bassins de rétention d'où l'eau
s'évapore. la fleur de sel reste le produit noble entre tous : cueillie à
l'aide des las, ces espèces de râteaux à très long manche muni à leur extrémité
d'une planchette, elle reste de couleur immaculée, rose quand elle est
extraite, blanche après séchage. Cette fleur passe en cuisine pour avoir un
extraordinaire pouvoir pénétrant dans les aliments, et ceci grâce à une
dissolution remarquable dans l'eau chaude (1). À titre comparatif, si chaque œillet
délivre par campagne (soit un an) environ 1.500 kg de gros sel, seuls 80 kg
de fleur de sel sont cueillis à la surface des « bassins ».
Enfin, pour ceux qui en doutaient, le sel de Guérande
est un produit sain, naturel, ne faisant l'objet d'aucune manipulation sinon
son conditionnement. Mieux, il peut se vanter d'avoir obtenu nombre de labels,
parmi lesquels, le label Rouge (1991), la norme de qualité ISO 2001, mais aussi
le Certificat de Conformité Produit (CCP).
(1) Ce qui nécessite une adjonction
en fin de cuisson, et non en cours, comme pour un sel normal.
Julien Frizot – Le Bien Public – Quartier libre n°196
(du 30 juillet au 05 août 2004).
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