CENTRE : LE CHINONAIS
Le coin est plus connu pour son superbe château
médiéval que pour ses vins. Pourtant, ces seconds sont de la même trempe : ils sont racés, élégants et bien charpentés, eux aussi !
Rude est la lutte entre pays ligériens tant le niveau
est élevé : pays d'Amboise, pays des Varennes, pays de Langeais, pays de
Bourgueil… Chacun revendique haut et fort le privilège des terres royales,
celui de la douceur de vivre, d'une richesse gastronomique et patrimoniale
unique ! Dans cette émulation de bon aloi, le petit pays de Chinon tire
substantiellement son épingle du jeu à arme égale avec ses imposants voisins.
D'abord, la géographie ne lui facilite guère la tâche.
Le Chinonais est, en effet, enclavé entre les landes
stériles du Ruchard à l'est, la forêt de Chinon au nord-est, et le pays de
Véron à l'ouest. Celui-ci jongle entre jolis bocages aux prairies inondables
par les sautes d'humeur de la Loire, bouquets d'arbres verdoyants, et terrasses
alluviales, fertiles, lui donnant une vision moins austère que ces voisins de
l'est.
Ensuite, il peut opposer à ses rivaux un patrimoine
conséquent dont l'une des pierres angulaires n'est autre que le château de
Chinon, vestige de trois forteresses successives qui ne semblent rien avoir à
envier aux châteaux d'Ussé, Azay-le-Rideau et de Langeais, pour ne citer que
les plus proches. Enfin, le Chinonais est aussi une terre de maraîchage, une
terre de vergers et potagers où fruits et légumes s'épanouissent entre clémence
du temps et alluvions…
Un vignoble de complaisance ?
Mais l'une des vraies richesses locales partagées
réside dans les vignes, un vignoble certes moins étendu que celui des voisins
d'en face de Bourgueil, mais consistant. S'épanouissant sur plus de 2.000
hectares, il s'égrène sur les deux rives de la Vienne, trouvant dans des sols
tour à tour sablonneux, schisteux ou encore gravillonneux et caillouteux, des
inspirations diverses…
On aurait tort de croire à un simple vignoble de
complaisance. Les vins de Loire sont des vins nobles, de haute extraction. Preuve en est cette AOC, définie par décret datant de
1937, qui impose quelques règles strictes à l'élevage de ce vin du Chinonais.
Les cépages ne font pas dans la figuration, c'est du costaud : pineau
blanc de la Loire et cabernet, voire cabernet-sauvignon (à hauteur de
10/15 %).
En tout et pour tout, la zone de production étend ses
sarments sur dix-neuf communes, certaines par partie seulement.
Côté robe, pour les rouges, on est loin des vins
sombres et épais aux riches tanins bourguignons. Ici, elle est légère, avec une
tendance à tourner au grenat pour certains sols et au pourpre pour d'autres. En
bouche, ils sont racés mais fondus, avec un nez évoluant du végétal au minéral,
et fruités. Les blancs peuvent présenter un profil tantôt sec, tantôt tendre, selon
l'ensoleillement de l'année.
Bref, des vins tout en nuances… à découvrir, bien
sûr, avec modération.
Julien Frizot – Le Bien Public – Quartier libre n°205
(du 1er au 07 octobre 2004).
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